En juillet dernier, l’association de défense des consommateurs musulmans, ASIDCOM, publiait le résultat d’une enquête explosive.
Lire : Boucheries halal à Lille : Asidcom publie une enquête alarmante
Les conclusions de l’enquête auraient dû faire l’effet d’une bombe. Elle est pourtant passée quasi inaperçue, ce essentiellement pour deux raisons.
L’inaction des consommateurs musulmans
Dans leur globalité, les consommateurs musulmans, très français, attendent que tout leur tombe du ciel. Ils sont en cela la preuve de l’intégration des musulmans dans cette France d’un jacobinisme pathologique. Quand il y a un problème, on ne se dit pas spontanément pas qu’il faille se retrousser les manches, se prendre en main ou, faute de savoir quoi faire, a minima réfléchir à une action.
Non. Quand des lanceurs d’alerte comme ASIDCOM travaillent dur malgré de faibles moyens, malgré les menaces, et permettent de lever le voile sur des vérités amères, la réaction spontanée est très rarement « c’est scandaleux, c’est décidé, à partir d’aujourd’hui je m’emploie à mon niveau à changer cette situation absolument scandaleuse ». Non, la réaction la plus partagée est plutôt : « mais que fait le CFCM* ? », « que font les autorités pour mettre fin à cette tromperie massive ? », etc.
Il est urgent que nous, musulmans, nous réformions. Si nous voulons changer notre propre condition, nous devons commencer par nous changer nous-mêmes. Rappelons-nous à cet effet le verset 11 de la sourate 13 dans lequel Dieu nous rappelle qu’Il ne modifie pas l’état d’un peuple tant que les individus qui composent ce peuple ne modifient pas ce qu’ils ont en eux-mêmes, ce qu’ils sont eux-mêmes.
Le désintérêt volontaire et politique des représentants musulmans
Lesdites autorités se fichent éperdument du consommateur musulman, et plus généralement des musulmans, sauf lorsqu’il s’agit d’en faire la variable d’ajustement de leurs desseins politiques. Pourquoi la mosquée de Paris que l’on présente – et qui se veut être – l’alpha et l’omega de l’islam dit « de France » ne s’est jamais véritablement émue du halalgate ? Pourquoi la mosquée d’Evry ou dans une moindre mesure la mosquée de Lyon ne s’insurgent-elles pas quand une fraude est mise au jour ? Pourquoi l’UOIF si prompt à vouloir dire aux musulmans ce qui est bien pour eux comme on l’a vu avec la tentative de hold-up au début du mois de ramadan se tait ?
Cet été, la chaîne D8 a diffusé au moins huit fois le reportage explosif de Feurat Alani. L’enquête, qui a fait grand bruit lors de ces deux diffusions sur Canal+ en octobre 2011 et en juillet 2012, continue de faire son effet notamment auprès de ceux qui n’en avaient pas eu connaissance. Sur Twitter, par exemple, l’émission a été saluée par de nombreux internautes.
Super enquête de @Feurat sur les margoulins du halal qui passe sur @D8TV ou personne n'est "habilité à répondre"
— pierre baudis (@pierrebaudis) August 14, 2013
Des dizaines (centaines ?) de milliers de téléspectateurs ont appris que le volailler Doux – au même titre que Tilly-Sabco ou le moins grand Salvel – est un fraudeur au halal notoire. Ces entreprises trompent leurs clients musulmans et inondent de faux halal les pays musulmans comme l’Arabie saoudite, le Yemen, l’Egypte, le Maroc. Cela depuis des décennies et en toute impunité. Le scandale est gigantesque, le sacrilège infâme : entre deux prières à La Mecque, autour de la Kaaba, les pèlerins consomment du poulet haram (illicite). Quant on sait l’importance de manger halal on ne peut qu’être outré par l’incurie du CFCM et plus généralement des consommateurs musulmans qui aujourd’hui pour beaucoup savent, mais laissent couler.


El Saada, du halal au porc, une fraude massive demeurée impunie
Autre exemple, la société Jouvin, spécialiste du porc et propriétaire de la marque ElSaada. Alors qu’elle a été prise la main dans le sac à deux reprises, d’abord avec sa marque Sébiane, puis avec ElSaada, Jouvin a gagné des parts de marché dans la grande distribution.
On a retrouvé à deux reprises du porc dans plusieurs des produits qu’elle commercialise, comme chacun pourra le constater sur le rapport d’analyses suivant.

Du porc trouvé dans des produits ElSaada abusivement estampillé halal.
Plus grave encore, alors qu’il était établi d’abord par la télévision belge – la RTBF –, puis des laboratoires d’analyses que la société Jouvin commercialisait des produits carnés contrôlés positifs à l’ADN de porc, l’ACMIF-mosquée d’Evry a accepté de certifier ses produits, offrant ainsi un blanc-seing à ce fabricant.
Lire – Halal : malgré le porc, la mosquée d’Evry certifie El Saada
Tout cela est proprement scandaleux, mais tant que les consommateurs musulmans ne se décideront pas à se prendre eux-mêmes en charge, notamment en soutenant des associations de consommateurs comme ASIDCOM (www.asidcom.org) ou l’UFCM (www.ufcm.fr), la situation ne changera pas. Ce silence éhonté du CFCM et de ses composantes est volontaire. Quant aux autorités françaises, elles ne donneront de la voix que lorsque le couperet tombera dans les pays musulmans trompés et que des milliers d’emploi seront sacrifiés notamment en Bretagne quand Doux, Tilly-Sabco et consorts seront blacklistés et ne pourront plus écouler leurs poulets abusivement estampillés halal dans des marchés aujourd’hui acquis. Encore une fois, ce sera le lumpen-prolétariat qui paiera le prix fort. Evidemment, le gouvernement actuel, comme l’ensemble des partis politiques, pleureront ces milliers d’emploi perdus. Ils auront été pourtant pendant des années les fossoyeurs volontaires d’une filière, la filière viande, plus précisément avicole. Ils savaient, ils savent, mais se taisent.
*S’agissant du CFCM, il faut noter une exception, en la personne de l’ancien président de cette instance, Mohamed Moussaoui qui sur ce point a été d’une constance appréciable. Lire Charte halal : le CFCM l’adoptera-t-il comme promis par M. Moussaoui ?